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Togo : La vraie indépendance est à réconquérir 

« Il est incroyable de voir comme le peuple, dès qu’il est assujetti, tombe soudain dans un si profond oubli de sa liberté qu’il lui est impossible de se réveiller pour la reconquérir : il sert si bien, et si volontiers, qu’on dirait à le voir qu’il n’a pas seulement perdu sa liberté mais gagné sa servitude… » (La Boétie)

Le Togo a commémoré hier mardi 27 avril le 61ème anniversaire de son accession à la souveraineté internationale. La grande majorité des Togolais qui ne se reconnaissent pas en leurs dirigeants actuels ne se sentent pas concernés par les célébrations officielles, occupés à survivre. Seuls les membres de la minorité qui gravitent autour du pouvoir central se retrouvent pour des festivités dans une totale indifférence de la population. Ça a toujours été ainsi et le 61è anniversaire, bien que célébré dans la sobriété pour cause de crise sanitaire, n’a pas dérogé à la règle.

La question fondamentale qu’on est en droit de se poser est si réellement le Togo a eu son Ablodé (indépendance) quand on sait que le cordon ombilical avec le colon dominateur n’est toujours pas rompu. Politiquement, économiquement, financièrement, dans tous les domaines, notre pays est toujours dépendant outrageusement de la puissance coloniale.

Peut-on parler d’indépendance quand les richesses, ressources et biens du pays sont bradés au colon contre son soutien à la pérennisation au pouvoir ? Peut-on parler d’indépendance quand, après une élection, on doit attendre fébrilement les chaudes félicitations de la puissance coloniale et d’autres pays comme preuve de reconnaissance internationale ? Peut-on parler d’indépendance quand une visite chez le colon est présentée comme un évènement du siècle ou comme une preuve de légitimité?

Le Togo est un pays dont l’économie repose essentiellement sur l’agriculture. Mais, récemment, des images d’investisseurs chinois prenant d’assaut les terres agricoles dans la région des Plateaux considérée comme le grenier vivrier du pays, avaient indigné beaucoup de monde et des appels avaient été lancés à l’endroit des membres de la diaspora togolaise qui ont des moyens à y investir pour empêcher les Chinois de faire main basse sur ces riches terres agricoles. Si rien n’est fait, dans quelques années, les Chinois seront des grands propriétaires de nos terres. Peut-on soutenir qu’on est un pays indépendant quand les Togolais deviennent étrangers dans leur propre pays ?

Sur un tout autre plan, un compatriote expliquait que « la notion d’indépendance est intrinsèquement liée à la notion de liberté et il est aberrant de fêter une indépendance vis-à-vis d’une puissance coloniale, lorsque les libertés individuelles ou collectives sont confisquées par une milice armée avec la bénédiction et la protection de la même puissance coloniale ».

Au Togo, bien que la Constitution garantisse des droits fondamentaux aux citoyens, depuis plusieurs mois, des restrictions sont imposées aux libertés publiques. La liberté de manifestation, de réunion, d’association, de presse, etc. sont remises en cause sous le fallacieux prétexte de la lutte contre le djihadisme ou la pandémie du coronavirus.

Dans les préfectures et villes de l’intérieur du pays, des actes d’intimidations et d’entraves à l’exercice des activités des partis politiques de l’opposition sont légions. Ce week-end, des responsables de la Dynamique Monseigneur Kpodzro (DMK) ont été interdits d’accès à certaines villes et d’animer des conférences de presse par les préfets, de véritables potentats locaux. Dans ces conditions, comment peut-on parler d’indépendance si en ce 21ème siècle, certaines villes du Togo sont frappées du sceau de « zone exclusive réservée » au régime cinquantenaire des Gnassingbé où  certains Togolais n’ont pas le droit de circuler librement et de mener des activités politiques ?

L’indépendance du Togo clamée ça et là demeure une chimère. L’indépendance, la vraie, est confisquée depuis 1967 par un clan et il est du devoir de tous de la réconquérir.

Médard AMETEPE

 

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