Grand Reportage

TikpiAtchadam : « C’est le peuple qui a le dernier mot »

 

Dans un long discours prononcé ce 27  août 2020, Tikpi Atchadam qui a disparu des radars depuis plusieurs mois a réaffirmé sa recette pour sortir le Togo sous le joug de la dictature. Il s’agit bien évidemment de son triptyque Transition sans Faure   –   Réformes   –   Elections. Après avoir fait le tour d’horizon de l’actualité sociopolitique du pays, le patron du PNP conclut que seul le peuple aura le dernier mot contre le régime de Faure Gnassingbé.

Chers compatriotes,

1960 – 2020 ! Soixante (60) années d’indépendance, et cinquante-sept (57) années de lutte de notre peuple martyr, depuis le 13 janvier 1963. Pendant toutes ces années, le peuple togolais se bat pour la souveraineté, la liberté de choisir ses gouvernants et définir la manière dont il souhaite être gouverné.

Depuis le 19 août 2017 qu’il s’est encore redressé face à la tyrannie, le peuple togolais, fondamentalement épris de liberté et de justice, a résolument accompli un parcours héroïque de combattant sans précédent. Tout ce qu’il cherche, c’est de retrouver les pleins pouvoirs pour se gouverner par lui-même et pour lui-même, sans interférence aucune.

Durant ces dernières années de lutte, tout a été presque dit, notamment sur la vraie nature du régime que nous combattons, sur les acteurs engagés dans la lutte, sur la lutte elle-même, sur l’objectif poursuivi, à savoir un Togo par tous et pour tous.

A travers ces discours rendus nécessaires par la lutte, et qui sont plus actuels que jamais, notre objectif n’était pas d’avoir raison. Avoir raison ne saurait être un objectif sérieux et noble pour un peuple en quête de liberté, de démocratie et de prospérité, après plus d’un demi-siècle de dictature féroce. Ainsi, tout exercice qui viserait à démontrer quia raison et qui a tort, serait une pure perte de temps préjudiciable à la poursuite de la lutte.

Les acquis de ce parcours de patriotes persévérants sont incontestables. En effet, la prise de conscience accumulée par toutes les composantes du peuple est tangible et irréversible. Et c’est bien ce qui justifie le plus la panique du régime. Aujourd’hui, les Togolais se trouvent au même niveau d’information et de compréhension. La Togolaise et le Togolais ont tout compris.

Au Togo il n’y a plus une langue politique, mais des langues politiques. Autant de langues nationales, autant de langues politiques, avec un effort inimaginable et soutenu de traduction de concepts juridiques et politiques clés. Dès lors, relèvent désormais du passé, les phrases du genre : Tais-toi ! On parle politique ; tu n’es pas allé à l’école.

Au cours de ces trois dernières années (Août 2017-Août 2020), le Togo est devenu un grand Amphithéâtre à ciel ouvert. Celui qui est allé à l’école, notamment le cadre, ne peut plus, pour défendre son poste, sa carrière, son rang social et ses privilèges exorbitants, utiliser la ruse face à un citoyen qui n’a jamais mis pied à l’école française.

Parler le français ou une langue étrangère n’est plus indispensable pour avoir droit au chapitre sur les affaires de la cité africaine qu’est le Togo. D’ailleurs, le fait établi que l’Afrique est le berceau de l’humanité et des sciences, y compris la science politique, n’est plus discuté.

Il n’est plus possible de duper politiquement le Togolais du village parce que l’on réside en ville. Plus possible de flouer politiquement le citoyen de la ville parce que l’on revient de la capitale Lomé. Impossible de mystifier politiquement un citoyen vivant au pays parce que l’on revient de l’extérieur, la diaspora.

Qu’avons-nous compris donc ? Sur quoi porte cette connaissance démocratique ? Les Togolais, sur l’ensemble du territoire national et dans toute la diaspora, renforcés dans leur conviction, savent qu’ils vivent, depuis le 13 janvier 1963, sous une dictature des plus cruelles.

Dans cette dictature basée sur le mensonge (les montages), la corruption (l’argent) et la force armée, tous les pouvoirs (Exécutif, Législatif, Judiciaire) sont entre les mains d’un seul homme, c’est-à-dire Faure Gnassingbé, se trouvant à la tête d’une minorité qui saigne, sans état d’âme, la mère patrie.

Toutes les institutions sont sous les ordres de Faure. Le gouvernement ne fait qu’exécuter ses ordres; le Premier ministre et les ministres le savent. Iniques, les lois sont faites dans un intérêt unique, c’est-à-dire la conservation du pouvoir et le maintien de Faure Gnassingbé. Chargés de la formalisation, de l’habillage de la volonté et des désirs de Faure en lois, les députés ne nous contrediront pas.

La police et la gendarmerie, qui opèrent, dans des circonstances étranges et à des heures indues, des arrestations musclées de citoyens pour leurs opinions, savent qu’ils exécutent des ordres manifestement illégaux. Ils ne peuvent pas le nier sans être ridicules.

Les militaires qui frappent des concitoyens, qui tirent à balles en caoutchouc et à balles réelles sur les manifestants pacifiques et les non-manifestants, savent pertinemment qu’ils travaillent en dehors de leur zone de compétence, qui est la défense du territoire nationale, et qu’ils font ce travaille rien que pour protéger le pouvoir à vie de Faure. L’armée ne dispose d’aucun argument contre.

La justice, si elle existe encore, n’est pas libre ; elle n’est pas indépendante ; elle est liée. Sous-couvert des juges, c’est Faure lui-même qui, à travers une irruption permanente dans la procédure, condamne et fixe la peine. Les juges ne prendront pas le risque de soutenir le contraire.

C’est la raison pour laquelle les avocats ne peuvent pas prendre la défense de l’orphelin et de la veuve. L’avocat qui prend le risque de s’engager dans une tentative de défense de certaines personnes, doit, pour le plus chanceux, mettre une croix sur sa carrière d’avocat. Il ne pourra jamais prospérer. Tous les avocats le savent ; ils ne nous démentiront pas.

Les Togolais sont persuadés qu’il est absolument impossible de se débarrasser d’une dictature par des élections. Aussi, cette idée agitée depuis la veille de l’élection présidentielle de 2003 qu’il faille, pour l’abattre, opposer à la dictature un candidat produit du système, est-elle désormais complètement et définitivement discréditée. Avoir été un acteur clé de la dictature ne saurait être un atout. Pour toutes et pour tous, il est clair que les élections ne sont qu’un rituel quinquennal de remise à neuf de la dictature avec, à chaque fois, des vies humaines sacrifiées.

Les Togolais se sont rendus compte que la société civile est paralysée par de nombreux agents infiltrés chargés de neutraliser et de contrarier de façon très habile et très professionnelle les quelques patriotes déterminés et de bonne foi. Les réseaux sociaux sont pleins de ces agents qui désinforment et sèment la confusion au sein des patriotes combattant pour la liberté.

Pour la presse privée, la Haute Autorité de l’Audio-visuelle et de la Communication n’est rien d’autre qu’un instrument de répression de la liberté de presse. La HAAC est une machine à broyer les journalistes qui ont toujours la plume droite, ces journalistes qui ignorent qu’être impartial, dire la vérité, c’est s’attaquer au régime.

Les Togolais ont la profonde certitude que leur pays ne sera jamais libéré par l’Armée togolaise. Le contraste entre, d’une part, l’injustice, la violence, la misère extrême au sein des Forces Armées Togolaises et, d’autre part, le zèle qui anime les militaires réprimant les populations se battant pour le peuple entier, le démontre à suffisance.

Même à huis-clos (dans une maison ou dans une chambre), ou en brousse loin des regards, la violence exercée par les militaires sur les civiles (femmes, hommes, enfants, vieillards) est des plus inouïes. Un peu comme si, même jusque-là, assis chez lui, Faure pouvait les voir à l’œuvre. Les militaires togolais craignent de payer pour le respect de la loi, pour leur prise de conscience ou leur indulgence coupable.

Tout ceci montre, malgré l’apparence, que la peur est très forte au sein de l’Armée.  L’Armée togolaise est un serpent dont la tête est Faure. Et comme vous le savez, s’agissant de la locomotion chez le serpent, le corps suit la tête, en passant par tous les points traversés par la tête. Le corps est otage de la tête.

Comme chacun de nous peut le saisir aisément, Faure Gnassingbé n’a pas peur de l’Armée togolaise. Il sait que ce n’est pas cette Armée qu’il désigne par ‘’Armée de mon père’’, qui lui barrera la route dans sa volonté ferme de monarchisation du pouvoir politique au Togo.

De façon assez rare et curieuse, l’Armée togolaise, otage de la famille Gnassingbé, est un agrégat d’éléments sans lien, chacun se méfiant de l’autre, d’où sa paralysie. De ce fait, l’Armée togolaise est plutôt à libérer. Le problème, c’est qu’une Armée ne peut, sans tomber dans l’humiliation et la déchéance, crier et appeler à l’aide des personnes ou des populations civiles, c’est-à-dire des populations non armées.

Que reste-t-il à dire à l’armée togolaise, qui n’a pas été déjà dit ? En quelle langue, en plus du français et des langues nationales africaines, faut-il parler à notre armée ? Que n’avions-nous pas dit à nos frères militaires ?

Tout a été dit. Hélas ! Les Togolais (femmes, hommes, enfants, vieillards) sont aux regrets de constater de toute évidence que l’Armée togolaise, faute d’esprit de corps, ne peut être une Armée de libération. Les récents événements ont fini de forger cette conviction chez chaque Togolais. N’est-ce pas trop demander à quelqu’un qui ne peut pas se sauver de nous sauver ? C’est de l’ordre du pouvoir et non du vouloir.

Soutenir que l’Armée peut, mais ne veut pas, serait une insulte, car elle n’a aucune raison de ne pas le vouloir, si elle avait le pouvoir. Tout le monde sait que l’Armée togolaise est acquise à l’alternance. Il n’y a rien de plus épuisant pour une Armée qu’une dictature politico-militaire.

En définitive, le piquet (l’Armée), ne pouvant pas agir pour se sauver, ne peut rien pour le mouton (le peuple).  Le mouton (le peuple) doit comprendre le piquet (l’Armée) avec lequel il est lié par la même corde, du fait de la famille Gnassingbé.

Ceux qui tentent de faire accepter l’idée selon laquelle Faure serait un otage entre les mains de quelques individus, font preuve d’ignorance sur ce qu’est une dictature. Un dictateur otage de son propre dispositif dictatorial ? Louis XVI otage de quelques membres de sa cour ? Hitler otage de Himmler ? Non !

En fait, Faure trône en souverain absolu au sommet de cette pyramide posée sur les crânes des citoyens Togolais et baignant dans leur sang. Et il en est parfaitement conscient. Au sommet du système dictatorial, Faure Gnassingbé lui-même sait que c’est par la force des armes qu’il s’impose aux Togolais. Il est même frustré par le manque de légalité et de légitimité de son pouvoir vigoureusement contesté.

Les Togolais ont compris que leur pays ne sera pas libéré par l’Union africaine, encore moins par la CEDEAO. La démocratie en Afrique, notamment dans les Etats de la sous-région ouest-africaine, est le fruit de la lutte des peuples concernés. L’Union africaine et la CEDEAO refusent toujours de comprendre que le Togo est contagieux, selon qu’il est une santé ou une maladie. Eh bien, le Togo, depuis le 13 janvier 1963, est une maladie très contagieuse. Nous avions avertis.

Devant le grand tribunal des peuples d’Afrique de l’Ouest, le dossier gouvernance le plus pourri, et pour cela franchement indéfendable, est l’ « Affaire Gnassingbé et consorts ». Le Togo : berceau des coups d’Etat en Afrique ; symbole de la dictature familiale en Afrique ; un condensé de la mal gouvernance politique, économique et sociale ; le fils installé dans le sang à la place du père mort, qui a régné d’une main de fer pendant quarante-deux (42) ans (1963 – 2005) ; le fils lorgnant un quatrième mandat ; les violations graves, massives et continues des droits humains depuis le 19 août 2017 ; etc.

Si la CEDEAO, composé par ailleurs de Chefs d’Etat septuagénaires, n’a pas dit la vérité au Togo, à Faure, elle ne dira la vérité nulle part ailleurs. Connaissant bien son dossier, l’homme le plus surpris et le plus étonné par l’attitude de la CEDEAO au Togo, n’est personne d’autre que Faure Gnassingbé lui-même.

Si la CEDEAO, avec une Constitution élaborée pour le Togo par un Expert qu’elle a elle-même recruté, n’a pas sauvé le peuple le plus meurtri d’Afrique de l’Ouest, elle ne sauvera aucun peuple africain. Dommage !

Les Togolais ont parfaitement compris que leur pays ne sera pas libéré par une puissance étrangère. Des années de lutte les ont forcés à revenir de cette illusion naïve. Les relations internationales sont basées sur les intérêts, et rien d’autre. Quel est l’intérêt pour une puissance étrangère de libérer un peuple qui mène un combat de démocrates, patriotes et souverainistes ? S’agissant de ce que l’on appelle la ‘’communauté internationale’’, ne perdons jamais de vue cette maxime tirée de la procédure civile : « pas d’intérêt pas d’action ».

Et pour le sage Africain : « Si une panthère vous arrache des griffes d’une lionne, vous n’êtes pas sauvé ». Se laisser libérer par une puissance extérieure, c’est accepter une nouvelle servitude. Un peuple qui se fait libérer par une puissance étrangère est, dès cette libération, prêt pour une nouvelle servitude. Quitter une servitude pour une autre ; est-ce cela notre projet, notre rêve en tant que peuple ?

Au-delà de tout, les Togolais ont compris de façon définitive que, de 1969 à 2020, nous avons connu trois systèmes politiques. Du système de parti unique sans opposition, le Togo est passé à un système de parti dominant, persécutant les partis d’opposition, avant de se retrouver dans ce que DialoDiop a appelé parti de contribution, et que nous appelons partis de participation ou partis de collaboration.

Un pays où règne la dictature avec des partis politiques de collaboration ou de participation, notamment aux élections et aux gouvernements d’union nationale, ne connaîtra jamais la démocratie. Dans un tel contexte, la dictature a toutes les chances de s’éterniser. Une telle opposition constitue la vis de sécurité de la dictature.

Le système de partis de contribution, de participation ou de collaboration, qui perdure, explique fondamentalement pourquoi, malgré les sacrifices consentis par le peuple pendant des décennies pour chasser la dictature, celle-ci est toujours en place. Ce système constitue la seule et unique raison suffisante pour laquelle vingt-sept (27) dialogues n’ont pas abouti. Une confusion totale créée de concert et entretenue par le pouvoir et l’opposition, une opposition sans frontière avec la dictature qu’elle combat.

Le système politique de contribution, de participation ou de collaboration ; voilà l’ennemi du peuple togolais, la clef pour comprendre le statu quo.

Chers compatriotes,

Une lecture objective de l’histoire constitutionnelle, institutionnelle et socio-politique de notre pays, force tout esprit rationnel à conclure à une transition. Transition sans Faure! Voilà l’urgence pour le Togo, le dénominateur commun qu’aucun patriote de bonne foi ne peut rejeter.

Au moment où la vie de chacun de nous est menacée par le régime, tout le reste peut attendre. De n’importe quelle position partisane il n’y a aucun problème à défendre ce dénominateur commun non partisan. Partis politiques, universitaires, société civile associative purgée d’agents du régime et d’ambition politique, responsables religieux, organisations de femmes, organisations de jeunes, artistes de la chanson, citoyens togolais, convergeons-y, avec des actions précises, concrètes et effectives sur le terrain.

La transition s’impose comme la seule issue. Elle sera chargée, après la libération de tous les détenus politiques, de la mise en œuvre de toutes les réformes indispensables pour la démocratisation du pays. L’œuvre de refondation du Togo achevée, les élections pourront être organisées. Voilà la voie de la normalisation pour notre pays.

Pour y parvenir, un impératif : libérer le Togo de la dictature afin que le peuple recouvre sa souveraineté confisquée depuis plus d’un demi-siècle. D’où viendra alors le secours ? Qui sauvera le Togo ? Qui va libérer le Togo ?

Peuple togolais ! Ton sauveur n’est personne d’autre que la personne que tu aperçois lorsque que tu te trouves face à un miroir. Oui ! C’est le peuple togolais qui sauvera le peuple togolais, donc le Togo. La règle est simple : Dans la société des nations, personne ne libère personne ; chacun se libère. Le Togo ne fera pas exception à la règle. Alors, lève-toi ! Bats-toi ! Libère-toi, toi-même ! C’est la liberté qui donne vie à la vie. Sans liberté, comment imaginer la vie ?

C’est justement ce peuple non armé qui, en se libérant, sauvera l’Armée togolaise des griffes ensanglantées de la minorité pillarde, pilotée par la famille Gnassingbé. Pour nous, il est trop tôt pour abandonner car, nous sommes d’avis avec Georges Clémenceau qui soutient : « il n’y a qu’une façon d’échouer, c’est d’abandonner avant d’avoir réussi ». Au lieu d’espérer qu’un pouvoir sourd, muet et aveugle nous écoute, nous parle ou nous voit, il est plus sage de le dégager.

Mais, Faure Gnassingbé a prêté serment, rétorqueront certains. Encore un serment, le quatrième du genre. Quelle est la valeur d’un serment qui n’engage pas son auteur ? Personne n’y croit ; pas même l’auteur lui-même, ni ceux qui l’ont reçu, encore moins le peuple. Ceci participe, pour reprendre l’autre, de la théâtralisation de la vie publique et politique. C’est extrêmement grave ! De qui se moque-t-on ? Des créatures humaines douées d’intelligence et dotées de bon sens que nous sommes, ou bien du Créateur lui-même ?

Un serment relève du sacré, du divin. Dans le cas d’un Chef d’Etat, c’est la parole donnée sous l’autorité du peuple et de Dieu. Tout serment suppose, en amont, légalité et légitimité, et implique, en aval, automatiquement, l’idée de responsabilité, de sanction, au cas où… Illégalité, illégitimité et impunité totale d’un côté, serment de l’autre, ne font pas bon ménage. C’est un alliage forcé. Ça ne marche pas.

Le serment que Faure Gnassingbé vient de prêter est un habillage du mensonge car, comme le dit Pierre Corneille : « Un menteur est toujours prodigue de serments ». Venant d’un pouvoir pervers, c’est un serment écrit à la surface de l’eau, du vent. Pour nous, cette cérémonie de prestation de serment n’est rien d’autre qu’un rituel de remise à neuf de la dictature, une cérémonie pour renforcer le genou de la famille Gnassingbé sur le cou du peuple togolais. En fait de serment, il s’agit plutôt d’auto-proclamation, comme en 2005, 2010 et 2015.

Le fameux discours du Président de la Cour constitutionnelle en est une illustration parfaite. Au minimum, ce discours ouvertement menaçant, en attestant de l’illégalité et de l’illégitimité de Faure, montre que le pouvoir n’est pas serein, qu’il est sérieusement contesté, qu’il redoute la plus petite prochaine étincelle, qu’il ne s’impose au peuple que par la force des armes.

Les Togolaises et les Togolais ne sont pas dupes. Ils n’ont que faire d’un chèque sans provision. Tout comme le quatrième mandat, ce serment, qui relève d’une comédie indigeste, est illégal et illusoire. Le serment que Faure vient de prêter est un non-événement. Pour nous il n’y a pas eu élection. Là aussi, c’est un non-événement. Par conséquent, nous ne parlons pas de démission de Faure. L’impératif que constitue la transition sans Faure est plus fort que tout.

A la fin imminente de la trêve observée, la lutte continue jusqu’à la chute de la dictature. Le mot échec n’existe pas pour un peuple qui, toujours debout, continue la lutte. Comme l’a si bien dit Albert Einstein, « il n’y a pas d’échec ; il n’y a que des abandons ». « Chaque pas vers le but est un but », dira Confucius. Alors, avançons !

Afin de conclure la lutte au plus vite, il y a un persistant besoin de détachement stratégique et raisonnable par rapport au sujet, aux individus. Dans l’histoire de l’humanité, toutes les fois qu’un peuple se lève et se bat comme c’est le cas en ce moment dans notre pays, les questions pertinentes posées sont : Pourquoi se bat-il? Contre quoi se bat-il? Jamais la question n’a été : Pour qui se bat-il?

Partout où des patriotes combattants ont obtenu la victoire, ils se sont battus pour des principes, pour des idées, pour des valeurs, pour une cause et non pour des individus.

Ainsi, le peuple haïtien ne s’est pas battu pour Jean-Jacques Dessalines et/ou Toussaint Louverture. Ces deux patriotes, non plus, ne se sont battus pour eux-mêmes. Tous se sont battus pour la liberté et l’indépendance du pays, Haïti.

Le vaillant peuple d’Afrique du Sud ne s’est pas battu pour Nelson Mandela. Celui-ci, non plus, ne s’est battu pour lui-même. Le peuple, Nelson Mandela et tous les autres leaders se sont battus contre le système d’Apartheid, pour la liberté, la justice et l’égalité.

Les Afro-américains se sont battus pour leurs droits civiles et politiques, pas pour Martin Luther King, qui était loin de se battre pour sa petite personne. Ceux qui ont manifesté aux Etats Unis d’Amérique, suite au meurtre de George Floyd par la police, ainsi que ceux qui les ont soutenus dans d’autres pays, ne l’ont pas fait pour George Floyd, mais pour la justice et l’égalité, contre la discrimination raciale. De toute façon, George Floyd n’était plus vivant.

Il est important de rappeler qu’il n’y a pas de principes, d’idées, de valeurs ou de cause auto-porteuse. Toute cause a besoin d’être portée. Le leader et tous ceux qui se battent avec lui, sont tous porteurs ; seule la cause est portée. L’idée que le leader est porté, relève d’une mauvaise lecture des faits sociaux. C’est juste une impression. Mais, il n’y a pas de lutte de libération sans leader. Un peuple qui se libère sans leader est sans précédent historique.

Le leader n’est pas choisi, il est le produit de la lutte elle-même. Le leader ne s’impose pas ; c’est la lutte qui impose le leader, parfois malgré lui. Le nom de Sylvanus Olympio retentira toujours comme un leader produit de la lutte pour l’indépendance du Togo. Nous sommes aujourd’hui en lutte pour notre deuxième indépendance, la première ayant été confisquée depuis le 13 janvier 1963.

Alors, comprenons-nous pour de bon ! La lutte que nous menons depuis le 19 août 2017 est dans la droite ligne du 05 octobre 1990. Au-delà, faisant écho à la lutte pour l’indépendance du Togo en 1960, elle est une lutte engagée avant tout pour la liberté, la souveraineté du peuple togolais. C’est une lutte de démocrates, patriotes et souverainistes.

Cette lutte est loin d’être une lutte pour la conquête et l’exercice du pouvoir comme c’est le cas pour des partis politiques dans un Etat normal. Donc, ne permettez plus à personne de continuer à vous parler d’élection, en soutenant ce non-sens d’élection sous une dictature.

Les acteurs politiques doivent ranger définitivement l’idée d’élection dans les tiroirs jusqu’à la fin de la refondation de l’Etat par la transition, après, bien évidemment, la chute de la dictature. Ce n’est qu’à partir de là que vont se confirmer ou naître les grands partis politiques appelés à animer le débat politique pour longtemps dans notre pays.

Loin de la situation actuelle, l’idéologie des partis politiques comptera à coup sûr. La lutte achevée, sans idéologie, sans discours politique et sans programme politique convaincant, il sera extrêmement difficile pour un parti politique de retenir l’attention d’une Togolaise ou d’un Togolais. L’ère des grands partis politiques aura sonné. S’ouvrira alors, entre ces grands partis politiques en nombre conséquent, un débat d’idées, dans un respect mutuel.

Enfin la normalité retrouvée, le Togo pourra relever la tête au moment même où l’appel de la mère Afrique pour l’accomplissement de son destin fédéral par ses filles et ses fils, se fait trop insistant et trop pressant.

En effet, pour ce troisième millénaire qui s’annonce bouleversant et excitant, l’Afrique se veut très matinale. Elle gronde. La révolution pacifique est enclenchée. C’est dans l’air ! Et si vous mettez l’oreille au sol, sur la terre qui a vu naître l’humanité, vous en aurez des nouvelles. Le crépuscule des longs règnes en Afrique que nous annoncions tantôt, est bien là.

Savons-nous que les Afro-descendants, et particulièrement les Afro-américains, souffrent à cause de la faiblesse de l’Afrique due à la balkanisation ? Eh bien, pour respirer, vivre et bien vivre, le monde Noir a besoin des Etats Unis d’Afrique.  Aussi, l’Etat fédéral africain a-t-il besoin de toute sa diaspora.

Coupable lointaine ou indirecte, l’Afrique a une responsabilité dans le manque d’égards pour ses filles et ses fils, de la part des Etats dont les tous premiers grands esprits scientifiques, philosophiques, littéraires et artistiques, ont été les étudiants de nos ancêtres, des Etats riches de nos ressources humaines et naturelles.

Ce manque d’égards manifestement exprimé sans gêne est d’autant plus grave et préoccupant qu’il a lieu aussi sur le sol africain. Nous respectons tout le monde partout, même chez nous. Mais personne ne nous respecte nulle part, même chez nous. Comment se fait-il, si ce n’est notre responsabilité ?

Face à cette situation, pour reprendre l’expression de Baruch Spinoza, la réaction sage serait celle-ci : « Ni rire, ni pleurer, ni haïr, mais comprendre ». Pour la jeunesse africaine, il s’agit de comprendre pour prendre conscience, s’organiser, se donner pour hâter l’avènement de l’Etat fédéral d’Afrique noire, la seule issue.

Mais, l’Afrique, conformément à la philosophie de la Maât, n’est pas dans la logique de qui dominera l’autre. Il s’agit de redonner l’humanité à l’Humanité, replacer l’Homme dans une position d’harmonie avec lui-même, avec les autres hommes, ainsi qu’avec toutes les autres composantes de l’Univers.

Pour le Togo et pour l’Afrique, le moindre gain de temps du régime de Faure Gnassingbé est une perte énorme. Alors, renforcez les fora, les plateformes de citoyens, les groupes WhatsApp et le porte-à-porte. Nourrissez le débat en recherchant, par la persuasion, un large consensus autour du constat sur le refus d’alternance par le régime, autour de l’objectif qui est la transition sans Faure en vue des réformes avant toute élection, et autour de la stratégie qui est la manifestation pacifique, avec pour force le nombre.

C’est le lieu de rendre un hommage soutenu à toutes les victimes du régime cinquantenaire, et d’affirmer notre soutien toujours renouvelé à tous les détenus politiques dont nous continuons d’exiger la libération pure et simple.

A ceux qui soutiennent qu’il faille essayer autre chose que les manifestations pacifiques, nous répondons ceci : autre chose, c’est que toutes les villes du Togo sortent, soutenues par les villages. Nous ne l’avons pas encore totalement fait.

Heureusement, en ce moment même, observant la trêve, des villes entières, des quartiers entiers et des villages entiers, n’ont pas désarmés ; ils sont prêts. La diaspora togolaise de par le monde n’a pas désarmée ; elle est prête. A ce niveau, pour consolidation, l’effort doit être maintenu par un travail soutenu.

L’effort de conscientisation, de sensibilisation et de mobilisation s’adressant au citoyen, compte tenu de cette donne, pour être efficace et productif sur le terrain, doit être géographiquement ciblé. Il convient donc de réfléchir pour comprendre ce qui retient encore certaines villes, certains quartiers et certains villages, afin de trouver la clef permettant de les mobiliser massivement pour les prochaines manifestations pacifiques.

Les populations de ces villes, quartiers et villages ont certainement leurs raisons. Elles n’ont pas l’information utile ; elles sont désinformées ; peut-être. Il faudra les convaincre par des arguments solides et imparables, développés dans la langue du milieu. Il ne s’agit surtout pas de les accuser ou de les blâmer. Non ! Pour se mettre debout, chacun de nous a besoin de comprendre. La durée de la tyrannie est fonction du temps de maturation du peuple qui doit imprégner la base, la masse.

Pour garantir l’assurance ferme d’une victoire historique et éblouissante aux yeux du monde entier, il devient déterminant d’apporter un appui substantiel, en termes de conscientisation, sensibilisation et mobilisation, au travail en cours dans les villes comme : Cinkassé, Dapaong, Kara, Kétao, Bassar, Niamtougou, Pagouda, Sotouboua, Blitta, Atakpamé, Amlamé, Agou, Notsé, Tsévié, Tabligbo, Vogan.

Des noyaux actifs existent déjà. Il suffit de les multiplier, de les renforcer et de les mettre en lien pour créer une sorte de toile d’araignée quadrillant toute la ville, avec des villages tentaculaires, gravitant autour de la ville comme noyau centrale.

Pour ce travail décisif d’intérêt vital, nous en appelons aux compatriotes patriotes ressortissants de ces villes, vivant sur place ou dans la diaspora, ainsi qu’à tout compatriote patriote maîtrisant la langue de ces villes. Vouloir prendre le risque d’assiéger militairement toutes les villes du pays est une chose ; en avoir les moyens humains et matériels en est une autre.

Nous nous trouvons sur un champ où les rapports de forces déterminent tout,  un champ sur lequel la naïveté n’est pas permise. Nous n’avons pas le droit de tergiverser. Celui qui se met à prier sans agir finira par nier l’existence de Dieu, tandis que celui qui agit sans prier est dans la négation de Dieu. Alors : réflexion – action – prière.

La Nation en danger a besoin de chacun de nous pour contribuer à la densification et à la généralisation de la prise de conscience. Pour ce travail de conscientisation, sensibilisation et mobilisation tous azimuts, toute occasion, tout espace est propice et tout à fait convenable : le champ, le marché, les lieux de services, les universités, les ateliers, entre Zémidjan et client, les églises, les mosquées, les couvents, les aires de sport et de jeux divers, la plage, au moulin, autour du puits, etc. Le pic de la phase de maturation produira conséquemment ce que nous appelons une société civile de masse, invincible dans la lutte pour une transition sans Faure Gnassingbé.

Contre un régime dont les tenants ont déjà un pied hors du pays, si la mobilisation est bien menée, et que la société gronde de partout, dans toutes les villes, dans tous les quartiers et dans tous les villages, nous n’aurons plus besoin de sortir que pour constater tout simplement la fin du système, et fêter la victoire de la souveraineté retrouvée par le peuple et pour le peuple.

La nouvelle Constitution tout-cousue, les villes et les quartiers assiégés, la loi anti-manifestations pacifiques, l’interdiction des réunions, les arrestations, les enlèvements et l’emprisonnement des patriotes engagés pour l’alternance, les mascarades électorales, le couvre-feu et le bouclage des villes sous prétexte du Covid-19, les exécutions à bout portant de citoyens en plein jour, etc., tout ceci prouve que Faure a peur du peuple. Il sait que seul le peuple togolais, et personne d’autre, pourra mettre fin à son pouvoir tyrannique.

Peuple en lutte !

En ordre de bataille et en rangs serrés, soyons prêts à poursuivre la lutte pacifique pour une seule et même cause : la transition sans Faure. Chacun de nous, individuellement, doit prendre ses responsabilités, et se battre pour mettre fin à cette situation insupportable pour nous, individuellement et collectivement.

Il est grand temps de dégager le genou de la famille Gnassingbé avant que celle-ci n’étouffe le peuple togolais en tant que personne collective. Au moment où dans notre pays, le droit à la vie, premier droit de l’homme, est rendu aléatoire par le régime, toute réflexion et action de patriote doit viser la transition sans Faure Gnassingbé. Ce qui manque au peuple en vue de la victoire se trouve en lui ; nous en sommes convaincus.

Pour les prochaines manifestations, il faut surtout faire en sorte que la capitale Lomé déploie tout son potentiel démographique. L’objectif visé est de déborder les Forces de Défense et de Sécurité, pour ne pas dire les Forces de répression. Il faudra mobiliser les villes citées plus haut pour desserrer l’étau autour des villes et quartiers militairement assiégés, qui pourront rejoindre la lutte une fois soulagés ou libérés de l’occupation militaire. Ceci constitue une disposition hautement sécuritaire pour les manifestants pacifistes appelés à inonder le pays tout entier.

Dans ce schéma d’ensemble, Lomé doit, en tant que capitale et ville de loin la plus peuplée du pays, jouer son leadership. Face à un élan massif du peuple, avec le poids démographique de la capitale Lomé, le régime ne résistera pas. Au bout de quelques jours seulement, c’est la fête de la libération nationale, annonçant, avec ces images, vidéos et selfies, comme vous savez bien le faire, la réconciliation véritable et définitive, le retour du Togo parmi les Nations respectées, parmi les Etats qui comptent pour l’Afrique.

Une équipe qui a les capacités de se qualifier aisément ne se place pas dans une situation où elle est obligée de compter sur le score des matchs entre les clubs des autres pools. Si tout le monde sort, nous n’avons plus besoin de mettre l’oreille à Paris, à Washington, à Berlin, à Londres, dans les Ambassades occidentales, etc.

Une fois la victoire acquise par le peuple togolais, les mêmes Etats sortiront des déclarations pour saluer un peuple brave, épris de justice et de liberté. Ils exprimeront leur admiration au vaillant peuple, vainqueur de la plus vieille et la plus féroce des dictatures de l’histoire du continent. Ils iront jusqu’à proposer leur accompagnement au peuple togolais. C’est cela ! La pratique du vol au secours de la victoire.

La position de la communauté internationale ou des puissances étrangères est toujours déterminée, dictée et orientée par les rapports de forces en présence sur le champ politique. Quant à l’Union africaine et la CEDEAO, dans l’impossibilité de sauver Faure Gnassingbé et son pouvoir monarchique, elles seront obligées de se ranger. Les panafricanistes font bien d’ouvrir le débat sur ces « faux ensembles ».

La détermination avec laquelle un peuple défend sa souveraineté acquise, est fonction de la nature de la tyrannie de laquelle il s’est libéré, et de tout ce qu’il a enduré pour s’en affranchir. Et seul celui qui se libère par lui-même connaît la valeur de la liberté pour ne plus retomber dans la servitude.

Dès qu’on essaye de saisir, ne serait-ce que par imagination logique, ce que Faure Gnassingbé et sa minorité veulent faire de notre pays à nous tous, on est saisi par une frayeur indescriptible. En finir avec ce régime est un choix que doit faire chaque citoyenne et chaque citoyen à son niveau. Après tout, tous les maux dont nous nous plaignons ici et là, quels que soient le secteur, la profession ou l’occupation, l’origine, la localité, l’ethnie, la religion, etc., reviennent au même : la dictature. Tous les maux dont nous souffrons, individuellement et collectivement, ont un seul nom : la dictature. Chassons-la ! Ne le perdons jamais de vue : l’Or de l’humanité est de l’Or pour les Togolaises et les Togolais, avant tout.

Bientôt la fin de la trêve. Préparons-nous ! Attendre c’est reculer ; c’est renoncer. Avec une détermination inflexible, exigeons et obtenons, de la façon la plus pacifique et la plus élégante possible, le départ de Faure et la mise en place d’une transition. Ce régime doit déguerpir dans une ambiance incroyablement festive. Chassez ce régime est la seule façon pour nous d’honorer tous nos martyrs.

Face aux puissances étrangères, face à la communauté internationale, face à la CEDEAO et l’Union africaine, face à une armée fidèle au dictateur, envers et contre tout, c’est le peuple, sous la protection du Créateur et face à son destin, qui décide. C’est le peuple qui a le dernier mot. C’est ça la souveraineté. Notre cause est juste. Or, Justice, Vérité et Dieu sont synonymes.

Au Togo, de notre temps et pour notre génération, la seule expression du patriotisme citoyen est son opposition ferme et indomptable au régime en place. Toute autre forme d’expression n’est que sonorité stérile, diversion et perte de temps pour le peuple en lutte depuis le 13 janvier 1963.

Alors, pas de temps à perdre ! Force et élégance au peuple togolais jusqu’à la victoire finale ! Dieu bénisse le Togo, Terre d’Afrique à nous léguée par nos ancêtres pour les générations futures.

Transition sans Faure- Réformes- Elections

Je vous remercie !

Tikpi Salifou Atchadam

Transcrit par la rédaction

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