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Togo : Une calamité démocratique en Afrique de l’Ouest

« Quand un régime se maintient au pouvoir au mépris du principe d’alternance prévu dans les textes, ce sont de véritables putschs contre les institutions, à reconnaître et à sanctionner comme tels » (Tournons La Page)

Le Togo est une curiosité en Afrique. C’est le seul pays au sein de l’espace CEDEAO à ne pas connaître l’alternance démocratique et où une dynastie familiale est au pouvoir depuis 54 ans. D’abord, le père, Gnassingbé Eyadema, qui règna sans partage pendant 38 ans, avant de mourir de sa propre mort en 2005. Il s’en est suivi une dévolution monarchique du pouvoir ; le fils prit le fauteuil de son défunt père dans un bain de sang. Entre 400 et 500 ont été tués, selon l’ONU, pour permettre au fils de prendre la place de son père. Aujourd’hui, Faure Gnassingbé est à son quatrième mandat, dans une région qui a érigé en dogme la règle de deux mandats. Réfractaire aux valeurs démocratiques et au changement, le seul souci du fils est de demeurer au pouvoir et de se ménager la présidence à vie comme son prédécesseur.

Le Togo est considéré comme un îlot de dictature dans un océan de démocratie. Du fait que ce petit pays se singularise dans une sous-région en proie à des mutations démocratiques où presque tous les pays engrangent des véritables avancées démocratiques. Au sein de la région ouest-africaine, plus personne ne supporte le règne au long cours de la dynastie Gnassingbé au Togo.

Un parlementaire de la CEDEAO, ulcéré par la calamité démocratique dont fait office le Togo dans l’espace communautaire, a interpellé ses collègues du Togo lors d’une session sur le long règne de la famille Gnassingbé. « Un citoyen m’a posé la question de savoir à quand la retraite présidentielle de la famille Gnassingbé. Selon lui, un Togolais qui a 55 ans aujourd’hui, ne connait dans sa vie comme présidents de la République que les Gnassingbé. Je souhaiterais que la délégation togolaise nous réponde », a lancé à ses collègues ce député de la CEDEAO. On aurait souhaité connaître la réponse de la délégation togolaise, soutien de la dictature au Togo.

Faure Gnassingbé, le « jeune doyen » de l’Afrique de l’Ouest, avait lui-même été interpellé sur le long règne de sa famille au Togo, en marge du 27ème sommet Afrique-France en 2017 à Bamako au Mali. « Je ne vois pas le rapport », avait rétorqué le président togolais. Une réponse qui avait énormément amusé le Web à l’époque.

Comme le relevait le parlementaire, plus de 90% des Togolais ne connaissent que la famille Gnassingbé au pouvoir. Pourtant le Togo est une république et non une monarchie. « Si de nombreux pays d’Afrique souffrent de l’absence d’alternance, ce n’est pas une question de culture, comme voudraient le faire croire les dictateurs. Ce sont des systèmes politiques organisés autour de l’accaparement du pouvoir et des richesses. Dans ce système qui profite aux dirigeants en place et à leur clientèle, mais aussi à bien des États et des investisseurs étrangers, la population est prise en otage », relève un rapport du mouvement citoyen international « Tournons la page » (TLP) qui classait le Togo, deuxième dictature au monde derrière la Corée du Nord.

Une dictature dopée aujourd’hui par la crise sanitaire. Au nom du Covid-19, les libertés publiques et les droits fondamentaux des Togolais sont drastiquement restreints. Dans son rapport 2020, le think tank brintannique The Economist insistait sur le fait que la dictature s’est aggravée au Togo, les mesures de lutte contre la pandémie de Covid-19 ayant conduit à un énorme récul des libertés civiles.

Aujourd’hui, le système politique au Togo est si verrouillé qu’aucune alternance démocratique à travers les urnes n’est possible. Comme l’affirmait le journaliste français Jean-Marc Four, « au rythme où ça va, les Gnassingbe vont encore diriger le Togo pour un moment ».

Médard AMETEPE

 

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