Editorial

Les hommes de Dieu et l’engagement politique

« L’Église ne peut ni ne doit rester à l’écart dans la lutte pour la justice. Tous les chrétiens, et aussi les pasteurs, sont appelés à se préoccuper de la construction d’un monde meilleur » (Pape François)

En RD Congo, l’Eglise catholique est toujours engagée politiquement. Elle est à l’avant-garde du combat pour la vérité des urnes, mais aussi pour l’Etat de droit, la bonne gouvernance et le développement du pays. Nous rappelions mercredi la sortie très musclée du cardinal Fridolin Ambongo Besungu, archevêque métropolitain de Kinshasa à l’occasion du 60è anniversaire de l’Indépendance du Congo. Il a fustigé avec véhémence la Coalition au pouvoir FCC/CACH entre le président sortant Joseph Kabila et Félix Tshisekedi qui, selon lui, entrainerait le pays vers le chaos.

Le prélat a élevé une vive protestation contre la présidente du parlement Jeanine Mabunda dans sa volonté d’imposer à la tête de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), un personnage qui a déjà fait ses preuves dans les fraudes électorales, malgré l’opposition des Eglises catholique et protestante et des Congolais. Et surtout l’introduction de propositions de loi par les Kabilistes visant à placer le système judiciaire sous leur coupole, prenant ainsi le contre-pied de la Constitution. Mgr Ambongo a lancé un appel au peuple à se mettre en ordre de marche et à faire barrage à ces velléités qui, d’après lui, n’ont comme unique objectif que de protéger les intérêts partisans de ceux qui ne veulent pas d’une justice juste.

Au Mali, l’imam Mahmoud Dicko, éminente figure religieuse, fait trembler le palais présidentiel. Ancien président du Haut conseil islamique, l’imam Dicko mobilise la rue pour dénoncer les injustices, la corruption, la pauvreté et l’insécurité qui gangrènent le pays. « Nous condamnons la mauvaise gestion du régime, les malversations, les détournements, le mensonge », a déclaré l’imam début juin 2020, lors d’une manifestation appelant à la démission du président malien Ibrahim Boubacar Keïta (IBK). Manifestation organisée par une coalition qui regroupe la Coordination des mouvements, associations et sympathisants (CMAS) de l’imam Dicko, le Front pour la sauvegarde de la démocratie (FSD) un regroupement des partis d’opposition et l’Espoir Mali Koura (EMK), un mouvement de la société civile.

Le 19 juin la Coalition est revenue à la charge lors d’une manifestation organisée à la place de l’Indépendance à Bamako. L’imam Mahmoud Dicko a appelé de nouveau le président à quitter le pouvoir.  « Le chef de l’Etat n’a plus les aptitudes physiques et mentales pour diriger le pays. Ibrahim Boubacar Keïta doit partir », avait-il lancé sous l’ovation des manifestants.

En avril 2019, il avait exigé à la démission du Premier ministre d’alors, Soumeylou Boubèye Maïga, qui avait rendu son tablier quelques jours tard. En 2011, il avait réussi  à faire suspendre la loi sur le code de la famille, après avoir mobilisé des milliers de Maliens dans les rues de Bamako.

Ici au Togo, la sempiternelle question s’est toujours posée sur l’engagement politique des religieux. Les évêques et les prêtres sont la cible constante du pouvoir togolais et de ses partisans, hostiles à la démocratie et au changement qui ont toujours vu d’un très mauvais œil l’implication de l’Eglise catholique dans la chose politique, c’est-à-dire aux affaires de l’Etat. Si le code de droit canonique interdit aux évêques de faire de la politique dans le sens de la conquête et de l’exercice du pouvoir, il ne leur est pas interdit de « combattre le bon combat », c’est-à-dire s’engager pour la paix sociale qui passe par la justice sociale, l’Etat de droit et la démocratie.

Médard AMETEPE

 

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