Editorial

La CEDEAO et la solution du pire

 

« Les élections n’effacent pas les problèmes » (Jean-Pierre Rafarin)

Le Togo traverse depuis plusieurs années, une crise sociopolitique, aggravée par les mouvements de contestation enclenchés en août 2017 par les Togolais pour exiger plus de justice, de liberté et de démocratie. A la suite de la parenthèse de sang de 2005, Faure Gnassingbé s’était engagé, à travers l’Accord politique global (Apg), à mettre en œuvre des réformes politiques et électorales devant permettre à notre pays de sortir des sentiers battus. Mais, au lieu de procéder courageusement et de manière  consensuelle au règlement diligent des importantes questions politiques et sociales qui préoccupent les populations, Faure Gnassingbé et les siens, se sont non seulement soustrait au respect des engagements pris, mais aussi ont toujours opté pour des élections frauduleuses qui ont le mérite de faire sombrer le pays dans une mal gouvernance chronique rythmée par les dérives du régime aux plans politique et financier, au plan des libertés fondamentaux des citoyens, etc.

Pour avoir relégué aux oubliettes les questions fondamentales des réformes politiques, de consolidation de la démocratie, de gouvernance et de l’Etat de droit, le pouvoir de Faure Gnassingbé a été ébranlé par des vagues de manifestations en 2017. Tant que ces questions ne trouveront pas de réponse adéquate, la crise demeurera.

Les élections n’ont jamais réglé le problème togolais. C’est plus qu’une certitude. Autrement, il y a longtemps que notre pays serait sorti de l’ornière. Comme l’admettait Faure Gnassingbé lui-même, « ne pas faire les réformes avant d’aller aux élections, c’est réveiller les vieux démons ». Curieusement c’est cette « solution du sparadrap » que semble proposer la CEDEAO au mal togolais.

Dans un communiqué attribué à l’institution communautaire et qui sème plus de confusion dans l’opinion, il est demandé au régime togolais d’accorder trois jours supplémentaires à l’opposition qui avait appelé au boycott, afin de faire enrôler les militants de celle-ci. « Concernant le recensement électoral, la CEDEAO encourage le Gouvernement à examiner la possibilité d’une prorogation exceptionnelle des inscriptions sur les listes électorales pour une période maximum de trois (03) jours pour permettre aux acteurs politiques et aux citoyens qui n’auraient pas pu se faire enrôler de pouvoir le faire sans préjudice de la date du 20 décembre 2018… », indique notamment le document brouillon et sans signature.

Et les réformes politiques et électorales prescrites par cette même CEDEAO dans sa feuille de route ? Mystère. Ce qui est écœurant, c’est que lors des consultations avec les protagonistes la semaine dernière à Conakry, le président guinéen Alpha Condé avait donné l’impression d’être en phase avec l’opposition sur les préoccupations soulevées par celle-ci en ce qui concerne la mise en œuvre des réformes avant toute élection et avait manifesté sa volonté à rechercher, ensemble avec ses pairs, des « solutions consensuelles pour une sortie définitive de la crise togolaise ».

Que s’est-il passé pour que le Facilitateur tourne casaque si vite ? Faire tenir des élections dans les conditions actuelles est suicidaire pour le Togo. La CEDEAO devrait le savoir.

Médard AMETEPE

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