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Encore le Conseil constitutionnel !

 

« L’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais d’institutions fortes » (Barack Obama)

La tension est vive en Côte d’Ivoire à quelque six semaines de la présidentielle du 31 octobre. La décision du Conseil Constitutionnel qui a écarté certaines figures de proue de la scène politique ivoirienne du scrutin n’est pas de nature à ramener la sérénité dans le pays.

Le 14 septembre 2020, le Conseil Constitutionnel ivoirien a rendu publique la liste des candidats retenus pour le scrutin présidentiel d’octobre. Sur 44 candidatures déposées, seules 4 ont été validées dont celle du président Alassane Dramane Ouattara pour un 3ème mandat controversé. Cependant, l’ancien Président Laurent Koudou Gbagbo et l’ancien président de l’Assemblée nationale Guillaume Soro ont été écartés. De quoi provoquer l’ire de ces derniers.

« Je conteste vigoureusement la décision injuste et infondée prise par le Conseil Constitutionnel. Je considère que c’est une décision inique, politiquement motivée, juridiquement boiteuse et qui s’inscrit dans une logique d’anéantissement de la démocratie et l’Etat de droit », a vigoureusement protesté Guillaume Soro.

L’ancien Premier ministre de Laurent Gbagbo, Pascal Affi Nguessan dont la candidature a été validée, dénonce le « caractère tyrannique du régime » de Ouattara. Quant à Mamadou Koulibaly, il parle de « putsch » et estime que le Conseil Constitutionnel s’est immolé par le droit pour Alassane Ouattara.

A propos du troisième mandat, l’opposition avait introduit des requêtes auprès du Conseil constitutionnel pour invalider la candidature d’Alassane Ouattara pour violation de la Constitution, mais sans surprise, elles furent rejetées. Ouattara est en roue libre pour prolonger son bail à la tête de la Côte d’Ivoire, étant entendu qu’« en Afrique on n’organise pas les élections pour les perdre ».

« Quand un président de la République viole la Constitution d’un pays, manque à sa parole et choisit lui-même ses adversaires, il est évident qu’il ne respectera pas le résultat des urnes », pense le confrère Serge Bilé.

En démocratie, la Cour constitutionnelle est l’organe de la Nation. « L’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais d’institutions fortes », déclarait Barack Obama lors de son discours d’Accra en 2009. Mais le pari est loin d’être gagné. Les institutions africaines sont aux antipodes des valeurs de crédibilité et de solidité que prône l’ancien président des Etats-Unis. Le Conseil Constitutionnel en Côte d’Ivoire en est la parfaite illustration. Les parjures et forfaitures de cette institution avaient mis le feu aux poudres.

En 2010, cette juridiction avait proclamé et Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara « président » de Côte d’Ivoire.  D’abord, le président du Conseil constitutionnel d’alors, Paul Yao N’Dré avait invalidé les chiffres provisoires communiqués par la Commission électorale indépendante (CEI) qui créditaient Alassane Ouattara de 54,1% contre 45,9% au président sortant Laurent Gbagbo, la CEI les ayant annoncés après l’expiration du délai de trois jours prévu par le code électoral. Il proclama Laurent Gbagbo vainqueur de la présidentiel après avoir annulé les votes dans sept départements du nord sous contrôle des ex-Forces Nouvelles. Et après l’arrestation de Laurent Gbagbo en avril 2011, le même Conseil constitutionnel avala son chapeau et proclama officiellement Alassane Ouattara président de la Côte d’Ivoire.

10 ans après, le Conseil constitutionnel n’a toujours pas fait sa mue. Il est toujours dans le mauvais rôle. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, il ne serait pas étonnant que la situation dégénère dans le pays.

Médard AMETEPE

 

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