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Fonds d’entretien routier et projet d’augmentation des frais de péage : Plus de 165,541 milliards FCFA générés entre janvier 2015 et octobre 2017

  • Faure Gnassingbé doit chercher du côté des ministres du Commerce successifs

Le 23 décembre 2020, un conseil des ministres a suscité des interrogations au sein de la population togolaise. Une des communications au cours de ce conseil a touché un point sensible : l’augmentation des frais de péage sur toute l’étendue du territoire national. Mais est-ce utile ? Est-ce nécessaire ? L’entretien des routes a-t-il vraiment un besoin de financement pour que les autorités en viennent à cette mesure ô combien décalée par rapport aux recettes générées par le Fonds d’entretien routier (FER) ? Un peu d’arithmétique pour démontrer aux populations, au gouvernement et surtout à Faure Gnassingbé que la gestion de cette manne échappe au contrôle alors que les recettes y afférentes couvrent largement les besoins exprimés. 

Voici ce qui ressort à la communication conjointe relative aux actions de modernisation  du réseau routier togolais et des dispositifs de péages présentée par le ministre des Travaux publics lors du conseil des ministres tenu le 23 décembre 2020 au nouveau palais de la Présidence : « De 2005 à 2020, de plus de 1.500 milliards de francs CFA investi dans le domaine des infrastructures routières. L’automatisation récente de nombreux postes de péages et la nécessité d’assurer une maintenance efficace conduit le gouvernement à envisager un ajustement des contributions des usagers. Pour mémoire, chaque année, le besoin de financement pour l’entretien régulier des routes revêtues, non revêtues s’élève à environ 30 milliards de francs CFA tandis que les ressources budgétaires totales mobilisées, se situent en moyenne autour de 17 milliards de francs CFA par an. Afin de combler cet écart, les tarifs des contributions des usagers (les engins à deux roues, les tricycles, les véhicules légers, les véhicules poids lourds de toutes catégories) seront ajustés d’ici les prochaines semaines afin de tenir compte des enjeux d’entretien et de modernisation de notre réseau routier. Il est à souligner que ces tarifs de péages n’ont pas connu d’augmentation depuis près de 15 ans ».

Que les péages n’aient pas connu d’augmentation depuis 15, 20 ou 30 ans ne devrait pas faire l’objet de communication, surtout lorsqu’on réalise que l’argent récolté depuis des années a de tout temps couvert les besoins en entretien routier.

165.541.635.000 FCFA de recettes du « fonds d’entretien routier » en 34 mois !

Dans les archives de l’Assemblée nationale, nous avons découvert qu’il existe des données sur les quantités de produits pétroliers commandées au moins entre janvier 2015 et octobre 2017. Parallèlement à cette découverte, la structure officielle des prix du mois de juillet 2020 renseigne que de tout temps, il existe au poste 15 de cette structure une rubrique dénommée « Fonds d’entretien routier ». Et que ce fonds, d’une valeur de 3.500 FCFA par hectolitre, est prélevé sur justement chaque hectolitre de « super » et de « gas-oil ». Place à la démonstration alors.

Lors de la commande des produits pétroliers, de janvier 2015 à octobre 2017, le Togo a commandé au total 4.974.809 tonnes de produits pétroliers dont 612.466 tonnes de super et 908.706 tonnes de gas-oil en 2015, 717.390 tonnes de super et 948.630 tonnes en 2016 ; puis 680.959 tonnes de super et 861.610 tonnes de gas-oil entre janvier et fin octobre 2017. Et voici ce qu’ont généré toutes ces commandes, en ramenant les 3500FCFA par hectolitre à 35FCFA par litre.

En 2015 : pour le super, 612.466 T équivaut à 612.466.000 litres x 35F= 21.436.310.000FCFA.

Pour le gas-oil : 908.706 T correspond à 908.706.000 Litres x 35F = 31.804.710.000 FCFA.

En 2016 : Super : 717.390.000litres x 35F = 25.108.650.000 FCFA.

Pour le gas-oil : 948.630.000 litres x 35F = 33.202.050.000 FCFA.

En 2017 sur dix mois : super : 680.959.000 x 35 F = 23.833.565.000 FCFA.

Gas-oil : 861.610.000 litres x 35 F = 30.156.350.000 FCFA.

Et lorsqu’on descend les chiffres, il ressort qu’en 2015, les Fonds d’entretien routier ont généré pour le super et le gas-oil, 53.241.020.000 FCFA ; l’année suivante, ils ont produit en tout 58.310.700.000 FCFA. Et en 2017, sur dix mois, 53.989.915.000 FCFA. Par rapport aux besoins pour l’entretien routier dont parle le conseil des ministres le 23 décembre 2020, il apparait, au vu des chiffres ci-dessus, que chaque année, entre 23 et 30 milliards FCFA de surplus devraient renflouer les caisses de l’Etat togolais après apurement des dépenses liées à l’entretien des routes et être affectés à d’autres urgences. Où sont alors passés ces surplus ? Au passage, ce petit exercice n’a concerné que la gestion de l’ancienne ministre Bernadette Legzim-Balouki au poste de ministre du commerce et Ninsao Gnofam à celui des Infrastructures et des Transports.

Messieurs et dames les ministres du commerce, à la barre !

Si Faure Gnassingbé et son gouvernement tiennent à comprendre comment les Fonds d’entretien routier se sont volatilisés, il suffit qu’ils se tournent vers les ministres du Commerce qui se sont succédé à la tête de ce ministère. Il s’agit de :

  • Du 08 octobre 2000 au 29 juillet 2003 : Dama DRAMANI
  • Du 29 juillet 2003 au 20 juin 2005 : Tankpadja LALLE
  • Du 13 Décembre 2007 au 28 novembre 2008 : Yandja YENTCHABRE
  • Du 28 novembre 2008 au 28 mai 2010 : Guy Madjé LORENZO
  • Du 28 mai 2010 au 11 mars 2011 : Seth Kokou GOZAN
  • Du 11 mars 2011 au 21 juillet 2012 : Kwesi Séléagodji AHOOMEY ZUNU
  • Du 21 juillet 2012 au 24 Janvier 2019 : Bernadette Essossimna LEGZIM BALOUKI
  • Depuis le 24 Janvier 2019 : S – T Kodjo ADEDZE

Le scandale dans la commande de produits pétroliers, c’est aussi ça !

Lorsqu’on devrait faire boire la ciguë à Galilée pour avoir affirmé en son temps que la terre tourne sur elle-même, il avait prononcé comme dernière phrase : « Et pourtant, elle tourne ». La justice togolaise avait condamné un confrère dans le dossier du pétrole il y a peu de temps. Parce qu’il avait avancé un chiffre difficilement croyable comme pouvant s’être évaporé sous la gestion du clan Adjakly. Mais en prenant du recul par rapport au chiffre donné, et en procédant de façon méthodique, on doit commencer à se dire que le chiffre avancé n’est pas si farfelu. Si en une année civile, les Fonds d’entretien routier peuvent, après règlement des 30 milliards FCFA de besoin pour la maintenance des routes, dégager une marge d’une vingtaine de milliards FCFA annuellement, en dix ans de gestion, on obtient facilement le chiffre des 500 milliards FCFA auxquels il avait fait allusion. Sans prendre en compte les recettes issues du mécanisme d’ajustement des prix des produits pétroliers qui génèrent également des fonds non négligeables. Toujours dans la période de 2015 à octobre 2017, nous avons pu déterminer qu’une dizaine de milliards FCFA étaient récoltés de ce côté aussi. Alors, l’une mise à la suite de l’autre, ces deux situations font hérisser les cheveux sur la tête. Du moins à ceux qui s’y connaissent en arithmétique. Que les péages n’aient pas connu d’augmentation ne doit pas être un argument pour justifier le saignement de la population inutilement. Il suffit à Faure Gnassingbé de se tourner vers les ministres sus-cités et il verra qu’une augmentation n’a pas de raison d’être au Togo. Du moins à plus ou moins longue échéance. Ou même vers ceux chargés de l’entretien routier. On ne se connaît que trop dans notre rectangle de pays !

Le Premier ministre Victoire Tomegah-Dogbé au cours d’une intervention portant sur le bilan des 100 jours de fonction, a insisté sur un nouveau paradigme qui demande à gouverner autrement en insistant sur l’obligation de résultats et la reddition de comptes. La situation jamais éclaircie de la gestion du secteur pétrolier est une occasion toute faite pour qu’elle et le reste du gouvernement montrent qu’ils se sont vraiment approprié cette maxime. Les résultats de l’audit consécutif au scandale dans la commande de produits pétroliers réalisé devraient, si c’est bien fait, relever la situation de la rubrique « Fonds d’entretien routier » et éviter qu’un conseil des ministres parle d’augmentation ou d’ajustement. Le matelas que constitue cette rubrique assure que même 100 ans plus tard, les frais de péage ne devraient pas connaître d’augmentation.

Godson K.      

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