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Libération des 49 militaires ivoiriens : Récupération et propagande autour du 5ème mandat

Depuis quelques jours, le gouvernement togolais jubile. Il célèbre sa victoire suite à la libération des quarante-neuf (49) militaires ivoiriens détenus par Bamako, dans une rocambolesque affaire de tentative de coup d’Etat. Entre le Mali et la Côte d’Ivoire, le torchon a brulé, et de manière très vive. Heureusement, tout est rentré dans l’ordre. Mais ce n’est pas fini ; vomies par leurs concitoyens, les autorités togolaises enclenchent les manœuvres d’une récupération aux senteurs de propagande pour un 5ème mandat.

Une ingérence qui devrait indisposer

Dans un communiqué publié par la Présidence de la République togolaise le 07 janvier, il est indiqué que  Faure Essozimna Gnassingbé a reçu les militaires ivoiriens graciés par le Président de la Transition du Mali. « En route vers Abidjan, la délégation ivoirienne a observé une halte à Lomé pour s’acquitter d’un devoir de gratitude envers le chef de l’Etat togolais pour son implication dans la gestion de la crise née de l’arrestation de 49 soldats ivoiriens au Mali en juillet 2022 », lit-on dans le communiqué qui rapporte qu’au nom du Président de la République de Côte d’ivoire, le ministre de la défense, Téné Birahima Ouattara a exprimé la profonde reconnaissance de son pays au chef de l’Etat togolais pour sa médiation qui a conduit au dénouement heureux de la situation. « Le Président Ouattara nous a demandé de venir remercier le Président Faure Gnassingbé pour l’action qu’il a menée pour obtenir la libération des 46 soldats [après celle des trois femmes militaires, déjà libérées en septembre 2022]. Il a fallu toute la détermination du Président de la République Togolaise durant ces six mois pour que nous puissions obtenir ce résultat aujourd’hui », a déclaré le chef de la délégation ivoirienne.

Le détour par Lomé des militaires ivoiriens a suscité moult réactions au sein de l’opinion, et des supputations. Mais dans les faits, il s’agit aussi d’une manière pour les autorités togolaises de faire la propagande autour de cette libération. En effet, depuis le début de son implication dans la crise qui a envenimé les relations entre le Mali et la Côte d’Ivoire, le Togo s’est montré très communicateur. Les moindres déplacements sont rendus publics via des communiqués. Si le pouvoir pouvait seulement rendre compte aussi fidèlement de la gestion des ressources du pays. Mais là n’est pas le débat.

Ce qui intéresse les Togolaises et les Togolais, c’est de savoir ce que rapporte au pays cette ingérence inopportune du Togo dans un dossier qui ne le concerne pas. C’est la question qui se pose depuis juillet et à laquelle personne n’a trouvé de réponse. La seule réponse à cette interrogation est qu’il n’y a pas de réponse logique. Pour un pays qui a toutes les difficultés du monde à satisfaire le minimum des aspirations de ses citoyens, cet effort diplomatique déployé par le Togo relève simplement de la futilité. D’autant plus que dans les instances régionales, un médiateur a été nommé pour concilier les positions.

Le contraste

Dans ce dossier, la position des autorités togolaises laisse songeur. En effet, les militaires ivoiriens qui sont des mercenaires, selon les termes utilisés par les autorités maliennes, ont été célébrés par le Togo. Alors qu’ils sont déclarés coupables d’avoir attenté à la stabilité du Mali, le Togo les accueille comme des héros libérés des griffes de leurs ravisseurs.

Autre chose qui accentue le contraste, c’est que dans le pays que dirige Faure Gnassingbé, les prisonniers d’opinion sont nombreux, trop nombreux pour un si petit pays. Ceux qui sont dans les geôles de la dynastie Gnassingbé n’ont fait qu’exprimer une opinion contraire à ce que tentent d’imposer les tenants du pouvoir. Contrairement aux militaires ivoiriens, les détenus politiques du Togo n’avaient ni armes ni munitions. Ils n’étaient armés que de leur détermination à voir leur pays sortir de la tourmente pour se hisser parmi les nations qui avancent politiquement, socialement et économiquement. Tout en mobilisant sa diplomatie pour la libération des militaires ivoiriens, Faure Gnassingbé reste sourd aux appels à la libération des prisonniers politiques dans son propre pays. Il faut être né sous une étoile particulière pour comprendre cette attitude.

Et la propagande suit…

Mais alors que l’on croyait ce dossier des militaires ivoiriens définitivement clos, revoilà le diplomate en chef de Faure Gnassingbé à Bamako. Il y a été reçu le 09 janvier. « Au nom du Président de la République  Faure Gnassingbé, j’ai remercié le Président de la transition malienne Goita Assimi pour la grâce présidentielle accordée aux 49 soldats ivoiriens détenus au Mali. Vive la coopération entre la Côte d’Ivoire et le Mali et vive le Togo », a-t-il écrit sur son compte Twitter.

La propagande se poursuit tant sur le plan national qu’à l’international. Mais c’est sur le second plan que les efforts sont le plus déployés, les tenants du pouvoir sachant qu’à l’interne, ils sont plus que vomis. Faure Gnassingbé veut faire croire qu’il est l’homme de la situation dans les pays africains comme le prétendait son père qui a régné 38 ans sur le Togo. Dans une analyse sur une radio de grande audience, il est évoqué le fait que l’issue de cette crise Mali-Côte d’Ivoire constitue pour Faure Gnassingbé un atout pour un éventuel mandat. «…le Togo y trouve enfin son intérêt en se positionnant comme un acteur majeur au sein de la CEDEAO. De quoi gagner en visibilité, en importance et en légitimité. Le président togolais Faure Gnassingbé exerce son quatrième mandat après avoir succédé à son propre père qui avait régné pendant 38 ans sur le Togo. Se construire une stature de médiateur pour la paix serait un incontestable succès et un atout sur la scène internationale dans la perspective éventuelle d’un cinquième mandat », a déclaré un journaliste d’un média international.

Cette analyse a de quoi alimenter la polémique autour de la longévité au pouvoir de Faure Gnassingbé. Pour certains acteurs, il s’agit d’une propagande en vue de faire accepter l’idée d’un 5ème mandat du chef de l’Etat togolais. Un sujet très sensible pour le Togo. En réalité, quelle que soit la stature internationale de Faure Gnassingbé, les Togolais ne veulent pas qu’il brigue un 5ème mandat. D’ailleurs, ils ne l’ont jamais voulu à la tête du pays. Et ça, tous les analystes du monde entier doivent en tenir compte.

G.A.

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