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Le pouvoir, du Bénin au Togo : Talon organise sa sortie, Gnassingbé son maintien

Du Togo au Bénin, l’actualité sociopolitique évolue. Pendant qu’au Togo on savoure un rayonnement sur le continent et une longévité au pouvoir, au Bénin, Patrice Talon semble avoir opté pour un atterrissage en douceur.

Dans le premier pays, on annonce des élections régionales et législatives dont le seul suspens est le degré des fraudes qui seront organisées par les éternels « vainqueurs ». L’autre actualité, c’est cette fameuse médiation dans laquelle s’est vautrée la diplomatie togolaise depuis plusieurs mois et qui a contribué, pour paraphraser les flagorneurs, à la libération des 49 militaires ivoiriens, jugés et condamnés par la justice malienne.

Dans le second, la majorité présidentielle est en train d’échapper au régime de Patrice Talon. Les élections législatives ont eu lieu le dimanche 08 janvier 2023. Selon les résultats publiés dans les bureaux de vote, la capitale Cotonou a voté majoritairement pour l’opposition dont Les Démocrates de l’ancien président Thomas Boni Yayi. La tendance d’une reprise de la majorité parlementaire par l’opposition se confirmerait dans de grandes autres localités du pays. Le parti au pouvoir va sans doute se faire battre dans les urnes. Dans la commune de Cotonou, Les Démocrates obtiennent 44,33% des suffrages exprimés contre 30,12% pour l’Union progressiste Le Renouveau et 15,81% pour son allié du Bloc Républicain.

Patrice Talon en passe de perdre sa majorité au pouvoir, c’est une demi-surprise. D’ailleurs le parti au pouvoir a déjà annoncé les couleurs. Dans une intervention quelques jours avant la tenue du scrutin, le Porte-parole du gouvernement Talon, Wilfried Léandre Houngbédji a déclaré que Patrice Talon serait prêt à composer avec  l’opposition s’il perdait la majorité parlementaire lors du scrutin du 8 janvier 2023. « J’ai le sentiment qu’ils (les Béninois) sont prêts à donner au chef de l’Etat les moyens législatifs pour continuer à mettre en œuvre sa politique au service du développement de notre pays », a-t-il déclaré.

Avant d’évoquer l’éventualité d’une perte de sa majorité au profit de l’opposition : « Si elle advenait, le président Talon au-delà d’être un homme pragmatique, un homme d’action est aussi un homme de dialogue. Donc si demain, il avait affaire à une Assemblée nationale franchement hostile à sa politique parce que dominée par les élus d’opposition, il considèrerait, à tout le moins, que ce sont des Béninois et ils ont intérêt aussi à ce que le Bénin progresse. Donc, il (Patrice Talon) discutera avec eux pour continuer sa politique », a expliqué le porte-parole du gouvernement.

Cette déclaration révèle en effet l’état d’esprit de celui qui dirige le Bénin d’une main de fer depuis son élection en avril 2016. Après avoir étouffé toute contestation, le richissime homme d’affaire devenu chef d’Etat semble avoir opté pour un desserrement de l’étau. Dans son deuxième mandat entamé sous les tirs de grenades lacrymogènes et d’arrestations d’adversaires politiques, le tenant du pouvoir cherche vraisemblablement à adoucir son règne qui devra prendre fin en 2026. Trois ans au cours desquels Talon va devoir rechercher le soutien de son opposition pour poursuivre ses chantiers.

Et c’est une belle option, peut-être la meilleure. Ayant opté pour le respect de la limitation à deux du mandat présidentiel, l’homme fort de l’ancien Dahomey n’a pas intérêt à faire enliser son pays dans une crise politique qui le contraindrait à vouloir se maintenir au pouvoir. Patrice Talon a certainement compris qu’il est raisonnable de descendre doucement de l’arbre sur lequel on est perché pour éviter une chute brutale. C’est sans doute pourquoi le tombeur de l’ancien Directeur de la Banque ouest africaine de développement (Boad) a fait tenir un langage rassembleur par son Porte-parole. Il y a une vie après le pouvoir, dit-on.

Lors du Sommet citoyen pour la démocratie, la bonne gouvernance et l’alternance, tenu en juillet 2021 au Bénin, Patrice Talon s’est engagé à ne pas briguer plus de deux mandats présidentiels. « Limiter les mandats est, à tous égards, au profit du peuple, plutôt que de laisser les uns et les autres rester éternellement dans la fonction. Vous avez absolument raison de prôner l’alternance. Je m’en soucie, pleinement et je m’engage devant vous à la défendre, à en être témoin », s’est-il engagé.

C’est tout le contraire du Togo. Le chef de l’Etat et son entourage donnent l’impression de conserver le pouvoir à vie. « Miagba tenté kpo 2025 » (Essayons encore en 2025, Ndlr) est l’un des slogans qui se répandent dans les esprits, après déjà quatre mandats à la tête du pays. Et avec sa volonté de marcher sur les traces de son géniteur et jouer le médiateur en Afrique de l’Ouest et sur le continent, Faure Gnassingbé manifeste son désir de régner encore longtemps. Aussi longtemps qu’il aura le souffle de vie. Dans cette logique, une décrispation de la vie sociopolitique n’est pas à l’agenda, parce que pour se maintenir au pouvoir, il faut brimer, violenter les adversaires, violer les textes. Bref, diriger le pays en dictateur. Les Béninois vont certainement connaître l’alternance en 2026. Un an plutôt, les Togolais vont assister au début du 5ème mandat.

G.A.

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