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A l’ONU, Muhammadu Buhari fustige le syndrome du 3ème mandat en Afrique de l’Ouest

Depuis quelques jours, le monde vit au rythme des interventions des chefs d’Etat et de gouvernement, dans le cadre de la 77ème session de l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies (ONU) qui se tient à New-York. Mercredi 21 septembre, le président Nigérian Muhammadu Buhari était parmi ceux qui ont accédé à la tribune. Il a prononcé un discours qui résonne dans les pays du monde entier. Il a évoqué la limitation du mandat présidentiel et la volonté de certains chefs d’Etat de s’éterniser au pouvoir. 

A 79 ans, l’homme qui a accédé au pouvoir en mai 2015 et réélu en 2019 pour un nouveau mandat de 4 ans est dans sa dernière année de pouvoir. C’est aussi sa dernière participation à une Assemblée générale de l’ONU, en tant que président de la République. Il ne briguera pas un 3ème mandat, ou un premier mandat d’une nouvelle République comme le présente son homologue ivoirien Alassane Dramane Ouattara. Aucun doute ne plane sur les intentions de Buhari vis-à-vis du pouvoir. Contrairement à ceux qui tentent de faire durer le suspense et se présenter à la dernière minute pour un 3ème mandat, allusion faite au Sénégalais Macky Sall, le candidat du « All Progressives Congress (APC) », le parti au pouvoir, pour l’élection présidentielle de 2023 au Nigeria et son colistier sont connus depuis juin dernier.

Muhammadu Buhari passera le témoin et ce sera un honneur, non seulement pour son pays, mais aussi pour sa personne. L’histoire retiendra que Buhari a fait deux mandats et a cédé le pouvoir. L’alternance par les élections se poursuivra donc au Nigéria, et il y a peu de chance que des colonels nigérians soient inspirés par leurs frères Burkinabé, Maliens ou Guinéens.

La fierté de Buhari, c’est d’avoir fait aussi bien que ses prédécesseurs. Il l’a martelé à la tribune de l’ONU. « En tant que président, je me suis fixé comme objectif que l’un des héritages durables que j’aimerais laisser est d’ancrer un processus d’élections libres, équitables, transparentes et crédibles grâce auquel les Nigérians élisent les dirigeants de leur choix », a déclaré Muhammadu Buhari.

Evoquant la limitation du mandat présidentiel et la tendance de plus en plus répandue du pouvoir à vie, le président sortant a appelé au respect des valeurs. « Nous croyons au caractère sacré de la limitation constitutionnelle des mandats et nous l’avons respectée avec constance au Nigeria. Nous avons vu l’impact négatif sur les valeurs lorsque des dirigeants, ailleurs, cherchent à changer les règles pour rester au pouvoir », a-t-il déclaré.

Les deux extraits de ce discours font penser à la situation sociopolitique du Togo. Depuis plus de 50 ans, les élections sont ce qu’elles sont. Des moments de formalités administratives pour donner un caractère légal à ceux qui détiennent le pouvoir et s’y accrochent via des élections d’une opacité avérée. Des élections libres, équitables, transparentes et crédibles, le Togo n’en compte pas. Ici, tous les partis n’ont pas les mêmes droits d’accès aux médias publics et ne disposent pas des mêmes moyens pour aller vers l’électorat alors que certains se servent des moyens de l’Etat pour battre campagne. La transparence et la crédibilité des processus électoraux sont entachés d’irrégularités criardes que minimisent les institutions en charge de l’organisation des élections.

Que dire de la limitation du mandat présidentiel ? Au Togo, c’est effectif sur le papier, mais dans les faits, ceux qui tiennent les rênes du pouvoir – et qui ont organisé le vote de la limitation des mandats après moult insistances et pressions, et avec des dispositions sur mesures – manifestent à travers leurs actions le désir de ne rien lâcher. J’y suis, j’y reste. Comme si le Togo était un royaume.

Depuis son accession au pouvoir en 2005 à la suite du décès de son feu père, Faure Gnassingbé n’a jamais montré des signes allant dans le sens d’un départ du pouvoir. Au contraire, après 17 ans de règne et s’étant aménagé un couloir jusqu’en 2030, si entre temps l’envie de faire sauter –une fois encore- le verrou de la limitation ne le prend pas, le fils de Gnassingbé Eyadema organise un retour au parti unique. Pourtant, tant en interne qu’à l’international les appels à son départ se multiplient. Les espaces de liberté sont de plus en plus restreints pendant que le pouvoir intensifie la propagande avec le concours des ministres et des cadres du parti dans les localités, et surtout les moyens de l’Etat

Il faut rappeler que Muhammadu Buhari n’est pas le premier homme d’Etat du Nigeria à déplorer l’appétit glouton de certains chefs d’Etat dont Faure Gnassingbé. Dans une interview à la BBC, Olusegun Obasanjo a ouvertement critiqué la volonté du Togolais de s’éterniser au pouvoir, soulignant que s’il était capable de grandes réalisations, il l’aurait déjà prouvé.

G.A.

 

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