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Gratuité de la scolarité au collège et au lycée : L’art de compliquer une situation déjà intenable

Pour la rentrée scolaire 2021-2022, la scolarité sera gratuite. Une bien mauvaise décision pour la qualité de l’enseignement au Togo quand on sait que l’expérience dans le primaire a été une catastrophe. A cela s’ajoutent le manque criard d’infrastructures devant accueillir les élèves, le problème des enseignants volontaires payés par les écoles, la réduction des heures de cours… 

« C’est une excellente nouvelle…Nous exprimons toute notre reconnaissance aux plus hautes autorités pour avoir pensé à nous, ce n’était pas évident. Souvent, c’est une casse-tête pour nous parents quand la rentrée approche ». Tels sont les propos de Edoh Koffi Misséboukpo, conseiller de l’Union togolaise des associations de parents d’élèves (UTAPE) rapportés par le confrère republicoftogo.com. Cette réaction est relative à la décision du gouvernement de rendre gratuite la scolarité des élèves des collèges et lycées, dans le cadre des mesures sociales en lien avec la lutte contre la Covid-19.

« La crise sanitaire que traverse le monde a eu des impacts socio-économiques sur toutes les populations et menace de creuser encore plus le fossé des inégalités et des vulnérabilités. Dans la poursuite des actions de renforcement de la résilience des populations togolaises et conformément à l’engagement du Chef de l’État, Faure Gnassingbé, de ne laisser personne sur le côté, particulièrement en cette période de préparation de la rentrée scolaire, le Gouvernement décide des mesures suivantes d’application immédiate : 1. La gratuité (prise en charge par l’État) des frais d’inscription et de scolarité pour l’année scolaire 2021/2022 pour les collèges et lycées d’enseignement public sur toute l’étendue du territoire togolais. 2. La prise en charge par l’État de la tranche sociale des factures d’eau et d’électricité pour le mois d’août 2021 », lit-on dans le communiqué.

Cette année scolaire 2021-2020, les parents d’élèves sont soulagés du fardeau que représentent les frais de scolarité. En réalité, la crise sanitaire liée à la Covid-19 et les mesures impopulaires prises par le gouvernement ont compliqué davantage la situation financière des familles qui ont été appauvries. Il faut donc les soulager, et la mesure gouvernementale de la gratuité de la scolarité est la bienvenue. Seulement, les contours de cette gratuité des frais de scolarité semblent n’avoir pas été bien appréciés. Et pour cause, le contexte actuel de l’éducation au Togo ne sied pas à une pareille décision.

D’abord, il faut rappeler que dans de nombreuses écoles relevant du public, une partie considérable des enseignants est volontaire et payée à partir des frais de scolarité et cotisations parallèles instaurées en complicité avec l’association des parents d’élèves. Avec la gratuité décrétée, il faut naturellement s’attendre à un manque de fonds dans les caisses des établissements scolaires avec pour corolaire des difficultés énormes pour la prise en charge des enseignants volontaires.

Ensuite, il y a le manque d’infrastructures scolaires. Depuis plusieurs années, les collèges et lycées ont déversé leur trop-plein dans les écoles privées qui ont su suppléer l’Etat. Qu’arrivera-t-il à la prochaine rentrée scolaire si d’autres parents décident de retirer leurs enfants du privé pour le public pour profiter de la gratuité des frais de scolarité ? Les écoles déjà surchargées vont craquer tant elles seront submergées par le flot des demandes d’inscription. Avec le manque d’infrastructures, les responsables des établissements scolaires seront dans l’obligation de rejeter un nombre important de demandes. La situation déjà compliquée va l’être davantage, sans aucun doute.

Il y a aussi le fait qu’avec la crise liée au coronavirus qui a entrainé la réduction des effectifs dans les salles de classes, les élèves ont été obligés de suivre les cours soit dans la matinée, soit dans l’après-midi. Ainsi, selon le programme établi, les élèves suivent en moyenne les cours pendant une vingtaine d’heures seulement par semaine. Largement insuffisant, raison pour laquelle le programme scolaire n’a pu être totalement dispensé. Si on en rajoute le grand nombre qui s’apprête à rejoindre le public au nom de la gratuité, il y a une forte probabilité que les élèves ne suivent pas les cours tous les jours de la semaine.

Enfin, le gouvernement n’a visiblement pas tiré des leçons de la gratuité des frais de scolarité du cours primaire. Avant cette décision qui a été prise sans mesures d’accompagnement, les parents préféraient faire instruire leurs enfants dans les établissements publics. La gratuité y a engendré une situation intenable pour les enseignants. Ce qui a déteint sur la qualité de l’éducation.

Aujourd’hui, on se retrouve dans le même schéma et si des mesures d’accompagnement ne sont pas prises, la gratuité de la scolarité va engendrer une descente aux enfers en termes de qualité d’enseignement.

G.A.

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