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Bongo fils se barricade à son tour

« Pour prévenir les abus, on ne peut lier le sentiment d’impunité et l’exercice du pouvoir » (Alain Leblay)

Les membres du club des chefs d’Etat africains sont connus pour être très solidaires surtout dans le mal. Dès que l’un d’eux initie une formule qui marche fort bien, en matière de longévité au pouvoir, comme s’ils se passent les mots, d’autres l’adoptent. C’est la règle sacro-sainte au sein du syndicat. Un pour tous, tous pour un.

Le Togo demeure la terre d’expérimentation, un incubateur des formules et initiatives les plus ubuesques et les plus déjantées qui font pourtant le bonheur des dirigeants d’autres pays qui ambitionnent de rester le plus longtemps possible au pouvoir : fraudes et braquages électoraux spectaculaires, répression des opposants, lois liberticides, instrumentalisation de la justice à des fins de règlements de compte politiques, militarisation à outrance du pays, verrouillage du système, criminalisation de l’opposition, diviser pour mieux régner, toilettage de la constitution, remise du compteur à zéro, troisième mandat, dévolution monarchique du pouvoir, pillage et accaparement des ressources du pays à des fins de corruption à haute dose, impunité, etc. autant de manœuvres politiciennes qui ont permis le règne sans fin du clan Gnassingbé au pouvoir.

Alpha Condé et Alassane Ouattara ont déjà adopté le tripatouillage de la Constitution et la remise du compteur leur permettant de s’offrir un troisième mandat controversé. Quant à l’autre fils à papa qui trône au sommet du Gabon, Ali Bongo Ondimba, foudroyé par un accident vasculaire cérébral (AVC) depuis 2018 dont il traine toujours les séquelles, il a décidé de se barricader, c’est-à-dire de s’octroyer l’impunité à vie comme l’avait fait son frère jumeau du Togo, Faure Gnassingbé.

On se rappelle, le 8 mai 2019, les députés « nommés » ont donné un feu vert hors norme au fils du père en le déchargeant de toute responsabilité et des conséquences pénales commises par lui ou en son nom pendant l’exercice du pouvoir. « Les anciens présidents de la République sont, de plein droit, membres à vie du Sénat. Ils ne peuvent être poursuivis, ni arrêtés, ni détenus, ni jugés pour les actes posés pendants leurs mandats présidentiels », indique le nouvel article 75 de la Constitution adopté par l’Assemblée monolithique. Les députés ont fait de Faure Gnassingbé un super président au-dessus de la loi, couvert par l’impunité ad vitam aeternam.

Le Togo n’a pas le monopole sur cette loi antidémocratique. Les députés togolais l’ont copiée de leurs collègues de la RD Congo qui avaient gracieusement offert un poste de Sénat à vie à l’autre fils à papa, Joseph Kabila. A son tour, le président « grabataire » du Gabon, Ali Bongo Ondimba a fait adopter le 18 décembre 2020, en conseil des ministres, un projet de loi portant amendement constitutionnel qui le couvre de l’impunité à vie : « Le président de la République qui a cessé d’exercer ses fonctions ne peut être mis en cause, poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé pour les actes et les faits de violation du serment, de haute trahison et pour les faits commis dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions », indique l’article 78 nouveau de la Constitution. Bongo fils peut prendre donc un repos mérité, sans souci d’être inquiété.

Mais la disposition constitutionnelle qui suscite un flot de commentaires est celle relative à la succession en cas de vacances à la tête du pays. Le poste intérimaire est désormais fort bétonné. L’article précise que les présidents des deux chambres du parlement et le ministre de la Défense devraient assumer l’intérim en cas de vacances du pouvoir. Précédemment, l’intérim devrait être assumé par le président du Sénat. Ali Bongo Ondimba préparerait-il sa succession ? C’est la question qui est sur toutes les lèvres…

Médard AMETEPE

 

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