Editorial

Plongeon de la démocratie dans la CEDEAO

 

 

« La CEDEAO continue à agir contre son propre slogan» (Nathaniel Olympio)

Dans une Afrique où les dirigeants sont obnubilés par la jouissance du pouvoir, la décision d’Alassane Dramane Ouattara de renoncer publiquement à se représenter pour un troisième mandat, avait suscité une multitude d’éloges à son endroit. Certains analystes l’avaient hissé au piédestal de grands hommes Africains à l’instar de  Nelson Mandela, Amilcar Cabral ou encore Kofi Annan.  Cette sage décision devrait sceller, estiment-ils, la réconciliation de tous les Ivoiriens.

« La soif de pouvoir est celle qui s’éteint la dernière dans le cœur de l’homme», disait Machiavel. Groggy par les délices du pouvoir, Alassane Ouattara qui affirmait vouloir transférer le pouvoir à la nouvelle génération en 2020, fait un rétropédalage spectaculaire pour se porter candidat pour un troisième mandat. Il a abandonné l’engagement qu’il avait pris devant les Ivoiriens, accréditant la thèse largement répandue selon laquelle il n’est pas un homme de parole. Oui, la parole d’Alassane Ouattara est passée à la trappe de ses appétences pathologiques pour le pouvoir.

Dans le starting-block pour un troisième mandat il y a son compère de la Guinée, le vieux Alpha Condé qui est aussi prêt à tout pour prolonger la jouissance du pouvoir. Après s’être taillé une Constitution sur mesure, rien n’empêche le vieil homme de prolonger son bail à la tête de la Guinée. Son parti, le Rassemblement du peuple de Guinée (RGP) l’ayant désigné comme porte-étendard pour l’élection présidentielle d’octobre 2020 par son parti le Rassemblement du peuple de Guinée, Alpha Condé a laissé planer un suspense trompe-l’œil.

« Je vous ai entendus, je prends acte », a-t-il déclaré. On imagine mal le président guinéen opérer son coup d’Etat constitutionnel et massacrer ses compatriotes pour finalement renoncer à se présenter à la prochaine élection présidentielle surtout quand on connaît l’obsession ravageuse qu’il nourrit pour le 3ème mandat. Son régime peaufine déjà l’odieux stratagème à la togolaise avec la remise de « compteurs à zéro », une escroquerie politique pour se maintenir au pouvoir indéfiniment.

Justement, c’est Faure Gnassingbé qui avait ouvert le bal du vice du 3ème mandat. Alors que tous les chefs d’Etat dans l’espace régional mettaient un point d’honneur à s’éclipser après deux mandats présidentiels, Faure Gnassingbé va ruser pour s’autoriser un troisième mandat avec la bénédiction d’Alassane Ouattara. Pour endormir l’opinion, il se présentera même comme la sentinelle de la démocratie sur le continent prônant une limitation du mandat à deux ou à trois. Mais cela ne l’a pas empêché de tripatouiller la Constitution pour se faire remettre le « compteur à zéro », ce qui lui permet de rester au pouvoir jusqu’en 2030. Il passera 25 années au pouvoir après les 38 ans de règne sans partage de son père Il est aujourd’hui à son 4ème mandat. Les protestations des Togolais n’y ont rien fait.

Aujourd’hui, c’est Alassane Ouattara et Alpha Condé qui, après avoir soutenu Faure Gnassingbé à se maintenir au pouvoir contre la volonté des Togolais, lui emboîtent le pas en portant des coups de canifs contre la démocratie dans leur pays. Avec les dérives autoritaristes de Patrice Talon au Bénin, on se dirige vers le scénario à la CEMAC, Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale où les chefs d’Etat, hostiles aux valeurs démocratiques, battent des records de longévité au pouvoir.

Médard AMETEPE

 

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