Editorial

Faure Gnassingbé retrouve le sourire

 

« Une bonne nouvelle agit sur moi comme un charme bienfaisant ; elle dissipe mon inquiétude, elle change le tour de mes idées » (Victor Cherbuliez)

Le revirement spectaculaire du président ivoirien Alassane Dramane Ouattara qui a décidé de briguer un troisième mandat doit faire beaucoup d’heureux au-delà de ses partisans. Parmi ceux qui doivent se réjouir de cette décision figure en bonne place Faure Gnassingbé. Et pour cause, depuis très longtemps, ce dernier est resté sous le feu des projecteurs comme le seul autocrate en Afrique de l’Ouest à ne pas adhérer aux principes démocratiques. Alors que tous les dirigeants se sont accordés à faire deux mandats présidentiels et à s’éclipser, Faure Gnassingbé est le seul dans l’espace régional à s’éloigner de cette ligne de conduite et à briguer un 3ème puis un 4ème mandat. Sa propension à s’éterniser au pouvoir vaille que vaille l’avait amené, on rappelle, à s’opposer énergiquement à la volonté de la Commission de la CEDEAO d’imposer l’alternance démocratique dans les quinze (15) pays membres. Faure Gnassingbé et Yahya Jammeh étaient les deux dirigeants qui avaient fait bloc contre ce projet communautaire.

Après la chute de Yahya Jammeh, le Togo est demeuré la seule calamité démocratique dans la sous-région. Faure Gnassingbé était de ce fait isolé. Avec le retour annoncé d’Alassane Ouattara qui brigue un 3è mandat et probablement aussi du vieux dictateur guinéen Alpha Condé, Faure Gnassingbé va pouvoir souffler. Il ne sera donc plus le seul à être caricaturé comme le croquemitaine de la démocratie dans l’espace CEDEAO.

De plus, Alassane Ouattara est connu comme le parrain de Faure Gnassingbé et n’hésite pas à lui apporter son soutien indéfectible. En 2018, alors que Faure Gnassingbé était fortement contesté dans les rues et que les populations exigeaient son départ du pouvoir, le président ivoirien vola au secours de son filleul en piégeant les opposants regroupés au sein de la Coalition des 14 partis (C14) avec l’affaire des 30 millions de FCFA qui leur avait pété au nez. Alassane Ouattara leur avait par la suite demandé de permettre à Faure Gnassingbé de briquer un 4ème mandat. « Faure est encore tout jeune, il faut le laisser faire un quatrième mandat !», leur avait-il lancé. Quand Dodji Apevon bondit de son siège et demanda pourquoi lui, il avait renoncé à un 3ème, Alassane Ouattara rétorquera que lui, il a pris de l’âge : « Moi je suis vieux, par contre Faure est encore tout jeune. »

En 2015, Faure Gnassingbé en difficulté après la présidentielle, appela à l’aide son parrain Alassane Ouattara qui débarqua à Lomé en compagnie de John Dramani Mahama. Le président ivoirien, selon ce qu’on avait appris à l’époque, avait ordonné à Jean-Pierre Fabre de reconnaître les résultats frauduleux proclamés en faveur de Faure Gnassingbé. Dans sa volonté de s’éterniser au pouvoir, celui-ci peut compter sur son parrain, soutien inconditionnel de la dictature au Togo.

On le disait, dans les starting-blocks également pour un 3ème mandat, Alpha Condé s’est toujours offusqué de ce qu’il appelle acharnement contre sa personne alors que d’après lui d’autres dirigeants ont tripatouillé la constitution pour prolonger leur bail à la tête de leur pays. Avec le rétropédalage d’Alassane Ouattara, le vieux despote guinéen devrait être tout aussi heureux et requinqué pour foncer sur son projet funeste de 3ème mandat.

Quand on ajoute à ce triumvirat, les dérives autocratiques du président béninois Patrice Talon, c’est la mort assurée pour la démocratie dans l’espace CEDEAO.

Médard AMETEPE

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page